mardi 6 novembre 2012

Acoma Pueblo : road trip de l'été 2012 dans le sud-ouest des U.S.A. (3)




Du 30 au 31 mai

Voici le Nouveau Mexique, Etat plutôt désertique, qui renferme beaucoup d'Histoire et nous laisse appréhender la culture indienne dans toute sa richesse.

On remonte plein nord pour découvrir des déserts plus rocheux que dans le Texas, accompagnés de hauts plateaux. Comme dans l'Idaho, il y a des vaches qui ne sont pas à la fête. Celles-ci sont parquées sans herbe sous leur pied. Quelle tristesse !

Je les appelle " vaches Mc Do ".

On traverse nos premières réserves indiennes :

Enterrement dans un cimetière indien. Notez le placement des croix.
On campe au KOA de Grants.

Ce camping est cerné par la roche volcanique.
Les propriétaires du camping nous ont raconté qu'au milieu du XVI ème siècle, Coronado (Conquistador espagnol) avait laissé des ânes sur la colline ci-dessous. Ceux-ci avaient assez à manger mais ils étaient prisonniers de la roche coupante. Ils ont donc sagement attendu le retour des explorateurs. Coronado est-il vraiment passé par là ?!
Colline cernée par la lave sèche.
Il y a beaucoup de visites intéressantes à faire dans ce coin, en relation avec les cultures indiennes constituées en " pueblos " ou villages. Décision est prise d'aller en premier dans la réserve des Acomas. Un paysage splendide nous attend, entre déserts et hauts plateaux calcaires : Acoma pueblo.

Carte postale. Acoma vu du ciel.
Ce village est perché sur un plateau ou " mesa ". Voici nos photos tout au long de l'approche du site :
Imaginez des plantations sur toute la partie herbeuse, au pied des plateaux.
Nous étions écrasés par le soleil, tout comme les photos !

La route mène au plus près du village, au pied du plateau.

Également nommée Sky city, soit la ville du ciel, c'est le plus ancien lieu habité en continu en Amérique du nord, occupé au moins depuis le XIII ème siècle. Établi sur ce plateau pour des raisons défensives, le village d'Acoma était occupé par les habitants des villages environnants qui avaient été abandonnés. En effet, les Navajos par exemple pratiquaient des raids dans ces villages. Pratiquement détruit par les espagnols en 1599, les habitants s'y installèrent à nouveau rapidement.



Vous connaissez le dessin animé " Les Mystérieuses Cités d'Or " ? Il est inspiré d'une histoire vraie puisque Coronado avait pour but de trouver ces 7 villes légendaires de Cibola. En effet, un espagnol rentré bredouille de l'expédition de Cabeza de Vaca avait inventé cette histoire. Du coup, il a alimenté la légende de la présence d'or en Amérique du nord alors que c'était faux. Coronado partit en 1540 du Mexique avec plus de 300 soldats, 4 prêtres, des centaines d'Indiens alliés, des esclaves et 1500 têtes de bétail. Avec son armée, il passa 2 ans à explorer des territoires inconnus et hostiles dont Acoma. Il crût là toucher son but car, lorsque le soleil frappe les pierres de ses rayons, on a l'impression que les maisons sont dorées.

Anecdote sur la soif de l'or chez les espagnols : Pizarro, pour convaincre les indiens de lui donner de l'or, a fait croire que lui et ses compagnons avaient une maladie de cœur guérissable uniquement grâce à l'or. Qu'est-ce qu'il ne faut pas inventer franchement !!

Une fois arrivés au pied de la falaise, la prochaine étape pour les espagnols consistait à trouver le chemin qui mènerait en haut du plateau. Seule une des 3 expéditions réussit cet exploit (la première en fait). En effet, les escaliers étroits étaient bien cachés par des dunes de sable.

Voyez-vous les escaliers ?


Ils sont carrément creusés dans la pierre.

Ces endroits escarpés sont un bon endroit pour construire un nid d'hirondelle.
Voilà donc le village indien :


Notre guide était Acoma et nous a expliqué l'histoire du site et l'importance des échelles que vous voyez en nombre sur la photo. En effet, pour atteindre le lieu spirituel de la maison, il fallait passer par une ouverture pratiquée dans le toit. Impressionnant non ?


Certaines maisons sont construites en briques de boue. Cette technique a été apportée par les espagnols qui, dès 1540, avec l'expédition de Coronado, ont réduit en esclavage le peuple Acoma, et ce pendant 80 ans. Se liguant avec les tribus voisines, les Acoma se sont révoltés et ont été libres pendant 12 ans ensuite. Puis, ils sont passés de non-citoyen du territoire mexicain à non-citoyen du territoire américain. Ils n'ont été reconnu comme citoyens pouvant voter qu'en 1948, après avoir servi dans les 2 guerres mondiales, en tant que volontaires !

Maison en briques de boue.

Certaines maisons en pierre sont protégées par un enduit fait de boue et de paille qui ressemble au "bousillage" de Louisiane.
Quelques maisons et autres détails d'architecture prises en photo lors de la visite :






La mission/église espagnole de Sky City, nommée San Esteban, fut construite en 1629. Le bois à été coupé à 40 kms du site et les esclaves indiens devaient porter les lourds troncs qui constituaient la charpente sans que jamais le bois ne touche le sol, même pendant la construction de l'église !!
La voici. On n'a pas le droit de photographier l'intérieur :




L'artisanat local est une tradition ancienne, avec des poteries blanches et noires présentées par des artisans du village. Allez voir sur Internet dans " Image Acoma Pottery ". C'est vraiment très beau. Il y a aussi les pointes de flèches en obsidienne (roche volcanique noire, coupante comme du verre) montées en pendentifs. Elles sont un symbole de protection.

En face du plateau se trouve d'autres plateaux de même nature mais inhabités aujourd'hui :


 Du village on aperçoit le musée en contrebas, bien intégré au paysage :


On le rejoint pour manger du " fry bread " (pain frit indien) et visiter les expositions. Le bâtiment n'a que 4 ans et il est magnifique par son architecture et par ce qu'il contient d'information :

Le musée, vu de la cour intérieur.
Les Acomas sont constitués de 13 familles. Les personnes qui, à tour de rôle, vivent sur ce site n'ont ni plomberie, ni fils électriques. Leur confort moderne est procuré par des générateurs et les toilettes sont disposées au dessus des falaises ! Même si toute la communauté ne vit pas dans ces maisons escarpées, elle s'y retrouve lors de cérémonies, des enterrements de chefs, ...

Chaque grande famille est représentée par un animal ou une plante. Les reconnaitrez-vous ?

A savoir :
- Le titre de propriété des maisons du village est toujours donné à la plus jeune des filles. C'est une société matriarcale.
- Les portes n'existaient pas dans ces maisons. Soit on passait par le trou pratiqué dans le toit, soit on enjambait la fenêtre pour passer à l'intérieur !

Un peu d'Histoire Indienne maintenant :

Le musée expose l'histoire de la conquête du Nouveau Monde et explique ce que l'on appelle les " graines du changement " pour les indiens (maladies, sucre, chevaux et bêtes de bétail et armes à feu). Ces derniers n'avaient en effet domestiqué que le dindon et le chien avant l'arrivée des européens. Ces derniers, eux, découvrirent le maïs, les pommes de terre, les tomates, etc.

On a aussi réalisé grâce à cette exposition que c'est parce que la culture de la canne à sucre demandait beaucoup de main d’œuvre (que les indiens ne pouvaient pas fournir) que le trafique d'esclaves d'Afrique a été mis en place...

Les indiens Mayas (Mexique) et Incas (Cordillère des Andes) étaient organisés en grandes cités avant l'arrivée des espagnols. Ces deux civilisations comptaient près de 20 millions d'âmes alors que tous les indiens d'Amérique du nord comptaient un peu plus d'1 million de personnes seulement. Les Mayas et Incas étaient puissants mais ont été impressionnés par les chevaux des espagnols. En effet, une légende disait qu'un jour des hommes-chevaux viendraient de très loin et qu'il faudrait les accueillir. Ils auraient mieux fait de se méfier !! Car 70 % des indiens sont morts de maladies apportées par les européens et leur bétail (mouton, poulet, porc, vaches, chèvres).

L'histoire de l'introduction des chevaux en Amérique du nord et des évolutions que ça a amené dans la culture indienne est aussi passionnante : certains chevaux amenés par les européens s'étant enfuit, les indiens les ont rapidement domestiqué afin de chasser plus efficacement le bison. De fermiers, ils sont devenus chasseurs nomades. Leur population grandit, ainsi que leurs tipis. Au final les concepts de propriété et de classes sociales sont apparus . Ce phénomène s'est accentué lorsque les indiens, devenus éleveurs de bétail, ont dû mettre en place des barrières pour contrôler les bêtes et leurs pâturages.

 
Finalement on n'a pas pu aller à Chaco car la route n'est pas goudronnée et il aurait fallu conduire de nuit pour essayer de trouver un hôtel/camping dans le coin (pas gagné vu comme c'est sauvage et loin de tout). Voici un dessin reconstituant un des sites, dans le canyon :


A retenir quand même : en 1050, Chaco était un centre religieux, administratif et économique dans le Bassin de San Juan. Des douzaines de villages de pierre à étages étaient reliés les uns aux autres par 650 kms de routes servant de communication pour les denrées mais aussi pour les rituels et cérémonies communes à cette culture Chaco. Certains lieux étaient peut-être utilisés périodiquement, comme à Poverty Point en Louisiane, pour des cérémonies, des mariages et le commerce (turquoise venant des mines alentours et transformées en bijoux, coquillages provenant de l'Océan Pacifique et du Golfe du Mexique, plumes de perroquets et aras venant du Mexique, etc). Échanger les savoir-faire, partager ces traditions et cérémonies étaient des valeurs importantes pour ces indiens et le sont encore pour leurs descendants aujourd'hui, les indiens du sud-ouest.

Photo scannée de Chaco Ketl.
Chaco Ketl fait partie des villes de la culture Chaco, florissantes dans les années 1050. Le grand rond est l'espace religieux, ou Kiva. Mais nous en reparlerons dans le prochaine article puisque nous nous dirigeons vers Mesa Verde National Park...



A lire, si vous trouvez ces textes :

- B. de Sahagun : The Aztec's own story. Un missionnaire a rassemblé des témoignages d'Aztecs peu après l'arrivée des conquistadors.
- Olaudah Equiano. Auteur d'origine africaine qui a écrit son témoignage concernant les conditions de transport lors de sa traversée de l'Océan en temps qu'esclave.
- Jared Diamond :  De l'inégalité parmi les sociétés - Essai sur l'homme et l'environnement dans l'histoire.




2 commentaires:

  1. Magnifique! Ce blog est une merveille de ressources et un voyage tres interessant! A tres bientot les amis!

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  2. Vision de films western avec ces maison en terre qui se confondent avec le paysage, dis donc il faut être souple pour passer par la fenêtre et pire par le toit !!! comment font les anciens ????

    Comment vivre dans ces conditions arides, ce serait pour nous un véritable retour aux sources ....

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